C’est en Juillet 2020 que Google UK s’est fendue d’une petite étude d’une centaine de page étudiant le comportement d’achat sur internet. Evidemment, ce n’est pas nouveau d’essayer de comprendre comment les internautes finissent par devenir acheteurs, et d’essayer de comprendre les raisons qui leur permette de choisir le produit et le vendeur de leur choix. Comme l’étude le montre, de nombreux modèles ont cherché à théoriser cela, dont certains sont encore populaires comme celui de William Townsend de 1924, « The funnel » ou celui de Jan Carlzon dans « Moment of Truth » en 1987**.
Cette modeste étude de Google ne semble pas prétendre émettre sa propre théorie (du moins, je le crois), mais essaye de détailler la part du parcours client réalisé en ligne en émettant un constat: entre l’envie et l’acte d’achat lui même, l’internaute parcours une boucle « infinie » de cycles entre un état d’exploration puis un état d’exploration, circulant de manière fluide entre les deux. Cette boucle semble perdurer, et l’étude se focalise ensuite sur les raisons (au travers de Google Trend) qui pourraient être à l’origine de la fin de cette oscillation pour se diriger vers l’acte d’achat.

Ce milieu d’exploration / Evaluation, ils l’appellent « The messy middle », certainement en référence et transposition du livre de Scott Belsky*** du même titre.
Si la théorie est plutôt plaisante, il reste à aller chercher des preuves plus tangibles que les recherches effectuées à la suite de cette mise en scène. Pour autant, lors de la gestion d’un e-commerçant, alors que l’on analyse le parcours d’un client, ses différents points de contact avec le produit, puis l’enseigne, et enfin l’acte d’achat, ce « messy middle » est certainement ce que l’on ressent le plus. Il ne s’agit en effet plus de comprendre le parcours complet, bien plus complexe que théorisé par le modèle AIDA, comportant bien plus d’aller-retours, mais bien de comprendre les entrées, les points de contact, et les raisons de décision de sortie de cette boucle. Et cette étude de Google offre quelques propositions de biais de décision:
- les paramètres heuristiques de la catégorie qui permettent à l’internaute de simplifier son parcours du combattant, celui de sélectionneur de produit. On parle ici par exemple du nombre de GB inclus dans un forfait téléphonique pour l’achat d’un téléphone avec forfait
- le biais issu de la prescription d’un expert faisant théoriquement autorité en la matière
- la preuve sociale, ou tendance à copier les comportements des autres lorsque le choix est difficile, de manière consciente ou non
- la tentation de l’immédiateté, cette capacité à s’extraire du rationnel pour choisir ce que l’on peut obtenir de suite
- Le principe de rareté, très bien exploité par de nombreux acteurs proposant des ventes à durée limitées, ou à stocks limitées, ou indiquant de manière opportune un nombre de visiteur présents au même moment sur le même produit.
- Le pouvoir de la gratuité, ce puissant levier qui peut lever les doutes, supprimer des étapes de réflexion au profit d’une croyance, d’une sensation: celle de réaliser une bonne affaire
L’exploration de ces 6 biais au travers d’un test de grande taille effectué sur 1000 acheteurs par catégorie testée est particulièrement interessante.
Je vous invite donc à la lecture de cette étude au plus vite, et de compléter celle-ci par des lectures remontant le temps, celle de Carlzon en particulier.
* Willian Townsend adapte alors le modèle AIDA (Awareness, Interest, Desire, Action) d’Elmo Lewis et parle de Funnel
** Jan Carlzon, alors à la direction de la SAS, compagnie aérienne en difficultés montrant que chaque point de contact client est le lieu de création d’impression pour le client, d’où sa théorie du renversement de la pyramide des pouvoirs, dans laquelle il suggère que les décisions doivent être prises au point de contact avec le client, sans attendre de décision de management
*** Scott Belsky: Messy Middle : https://www.amazon.fr/Messy-Middle-Finding-Through-Hardest/dp/0735218072